Primum non nocere
Publié par 10lunes le 22 novembre 2015 dans Blessures
Cette semaine, j’assistais à un congrès périnatalité, évidemment organisé bien avant les attentats. Il a été maintenu, assorti de quelques mesures de « sécurité » : Je peux voir votre valise, vous n’avez pas de bombe hein ? Ahahaha…
Nous étions dans une petite ville balnéaire, désertée par ses habitants aux premiers jours de l’automne, presque isolés du reste du monde.
Discuter EBM et puissance statistique par ces temps heurtés s’annonçait dérisoire. Pourtant, nous y sommes arrivé.
C’était comme une bulle de normalité, un espacé préservé qui faisait du bien.
Je ne sais pas si l’ombre des attentats planait sur nos têtes, si la chaîne de solidarité qu’ils ont déclenchée y était pour quelque chose mais ce congrès était étonnamment apaisé. Pas de grands discours, de décorum, de querelles d’ego et même pas de pingouins. Pontes et plèbe ont fait assaut de jeans-baskets.
L’essentiel était ailleurs. Comme la promesse d’une obstétrique redevenue humaine.
Dénoncer l’hypermédicalisation inutile et anxiogène de ce concept très français qu’est la menace d’accouchement prématuré.
S’attacher aux modalités des annonces faites aux parents lors de problèmes découverts pendant la grossesse.
Remettre en cause des pratiques qui font mal aux tenants de la physiologie comme l’épisiotomie (simple rappel bien sûr, mais toujours bienvenu) ou – sujet plus inattendu – le clampage immédiat du cordon…
Pour certains, dont je suis, qui ont toujours laissé le cordon cesser spontanément son battement afin de permettre la poursuite des échanges sanguins entre mère et enfant, cela pourrait apparaître comme la réinvention de l’eau chaude. Mais c’est la réinventer avec des données et des études à l’appui ; et donner ainsi les moyens à chaque praticien de s’affirmer scientifiquement face à des protocoles obsolètes et obtus.
Les interventions ont encore traité de prévention, de travail en réseau et d’usagers indispensables pour empêcher les professionnels de penser en rond…
Même le toujours polémique sujet des maisons de naissance a été abordé avec respect bien que la tension soit un poil plus palpable.
Et puis le congrès a pris fin, chacun est rentré chez soi, retrouvant état d’urgence, infos, hommages et appels à résistance.
Impuissante face à la terrible absurdité du monde, je veux croire qu’une société équitable et solidaire se construit dès les premiers instants d’une vie. Je ne peux rien sauf respecter parents et nouveaux nés, laisser les émotions s’exprimer, prévenir, accompagner, soutenir.
En toute humanité.
Parce que ça s’enracine où la violence, à quel moment de la vie ?