Tous les médias en parlent. Pour faire des économies, l’assurance maladie dégaine une nouvelle arme, le raccourcissement des durées de séjour en maternité.
Sauf que …
Les séjours plus courts, c’est déjà la réalité. Fermetures d’établissements obligent, le nombre de lits est en diminution constante. 32018 lits de maternité en 1975, 17686 en 2007. D’autres ont disparu depuis. Actuellement, Les Lilas, Orthez, Royan… sont menacés. Les maternités restantes absorbent difficilement les accouchements, encore plus difficilement les séjours.
Partout, on cherche – chasse – la patiente de bonne volonté qui accepte de sortir plus tôt que prévu pour libérer une place… Et dans le CHU voisin, les lits sont doublés dans des chambres prévues pour un seul hébergement..
Il y a quatre ans, la sécurité sociale lançait l’expérimentation Prado. Je dénonçais à l’époque une « nouvelle organisation » à type d’usine à gaz alors que tous les outils nécessaires existaient déjà pour assurer le suivi des familles lors de leur retour à domicile. Personne n’était dupe… A terme, les durées de séjour allaient raccourcir et la sécu l’anticipait. La main sur le cœur, nos interlocuteurs de l’assurance maladie juraient qu’il n’en était rien.
Nous y sommes…
Je n’ai rien contre la sortie précoce, voire ultra-précoce quand elle est choisie. Certaines femmes souhaitent un accouchement ambulatoire, d’autres préfèrent carrément éviter l’étape maternité et faire naître leur enfant à la maison. Cette mesure pourtant économique n’est pas encore encouragée par notre chère sécu…
Mais raccourcir les durées de séjour, ce n’est pas proposer une sortie à la carte, en fonction des besoins de chacun, c’est imposer aux femmes de partir au plus vite, quelles que soient leurs conditions de vie, de logement et le soutien dont elles disposent chez elles… .
Je n’évoque même pas ici l’inhumanité de certaines situations. La visite de la sage-femme, aussi attentive soit-elle, se centre sur la santé et le bien-être de la mère et de l’enfant. Elle ne prépare pas les repas, ne fait pas la lessive, n’emmène pas les aînés à l’école et ne remplit pas le frigo. Quid du repos nécessaire pour les femmes peu entourées ? Prévoir une aide natale, sur le modèle hollandais serait une mesure peu coûteuse et bienvenue… ce n’est pas à l’ordre du jour.
Enfin, les maternités ont déjà le plus grand mal à boucler leur budget. Raccourcir officiellement la durée de séjour, ça ne signifie concrètement qu’une seule chose : diminuer la tarification correspondant au séjour post-accouchement. Le peu que chaque service « grattait » avec des sorties un peu plus rapides va donc être reperdu.
Les économies, il faudra les faire ailleurs, dans les services, en réduisant le nombre de postes.
Et là, ce sont encore une fois les femmes qui en payeront le prix. Etre bien accompagnée suppose que l’équipe soit disponible, donc en effectif suffisant.
Une équipe surmenée, c’est moins d’écoute, moins de réassurance, plus de symptômes*, donc plus de consultations, de bilans, de prescriptions, de péridurale, de perfusion, d’hormones de synthèse, voire d’hémorragie, de traitements lourds…
Elle est où l’économie ?
*Extrait de ce rapport « On notera que les sages-femmes sont moins prescriptrices, du fait de consultations plus longues et mettant l’accent sur le conseil et la prévention au-delà de l’acte médical ».